L'histoire du Château d'Obsinnich

 
 

Obsinnig (jadis Opsinnich), situé sur la Gulpe en amont de Sinnich, paraît avoir fait primitivement partie de cette dernière localité. L'usage balance aujourd'hui pour ces deux dénominations entre les finales «ich», plus ancienne, et «ig», plus récente, mais les formes Obsinnig et Sinnich semblent prévaloir.

L'origine de Sinnich est extrêmement reculée. On a voulu rattacher ce nom à celui des Suniciens, une des peuplades qui vinrent, sous l'empereur Auguste, se fixer dans l'Eburonie ravagée par César. La toponymie voit dans « Sinnich » un de ces termes gallo‑romains terminés en « acus » et désignant de grands domaines de l'époque impériale, qui ont donné de nombreux noms (le lieux en « ich » ou en « eke ». Sinnich ou Sinneke est le domaine de Sennius et dérive de Senniacus.

Au milieu du XIIe siècle, il existait à Sinnich une église qui avait été brûlée et on distinguait déjà alors inferior Sinniche et superior Sinniche lequel correspond à Obsinnig, La loca ité remonte donc à une époque antérieure à la fondation du monastère en 1243. Un des districts du duché de Limbourg, qui devait avoir à partir du XVIe siècle Montzen pour chef‑lieu, était précédemment dénommé «ban de Sinnich et Völkerich ».

Le château primitif d'Obsinnig a été vraisemblablement construit au XIIe siècle. Il fut pris en 1285 par le duc jean 1er  de Brabant. lors des guerres pour la succession du Limbourg, en même temps que ceux de Remersdael, de Veltjaren et de Wodémont. Il fut détruit en 1288 après la bataille de Woeringen. Il semble avoir constitué un bien allodial et avoir gardé cette qualité au cours des siècles, car il n'apparaît pas dans les registres des cours féodales.

Un acte du 9 mai 1333cite le chevalier Th. de Upsinneke. On rencontre en 1369, un chevalier nommé Guillaume de Roide, sire de Sinnich, ennemi du duc Wenceslas de Brabant et faisant la guerre aux Eupenois qui tenaient le parti de leur souverain.  Ce personnage appartenait à un lignage limbourgeois, dont le nom se présente sous des formes très variées : Roide, Roie, Roye, Rhoye, Rode, Rot‑de, Roe, Rohe, Rhoe. Ce lignage a prospéré et possédé de nombreux biens dans l'est du duché. La branche qui occupait au XIVe siècle le château d'Obsinnig a ajouté ce nom au sien et la famille de Rohe ou de Rhoe d'Obsinnich s'est répandue en Rhénanie et en Hollande. Trois de ses membres remplirent au XVe et au XVIle siècle les fonc­tions d'échevin d'Aix‑la‑Chapelle. Le baron Jean‑Frédéric de Rhoe d'Obsinnich, seigneur de Baerlo (Venlo) était lieutenant général au service des Provinces‑Unies et mourut à la guerre en Portugal en l704. Sa fille, Eve‑Thérèse‑Florentine, baronne de Rhoe d'Obsinnich, épousa le 23 janvier 1707, au château d'Olne, Guillaume‑Plilippe d'Olne seigneur de cette localité, et elle y décéda le 15 août 1754.

Le château d'Obsinnig entra, dans la première moitié du XVe siècle, en la possession de la famille d'Eynatten, qui devait le conserver jusqu'en 1721. Thibaut d'Eynatten, fils de Jean et de Jeanne de Neubourg (Galoppe) est le premier de ce lignage qui soit intitulé seigneur d'Obsinnig. Son fils Michel, par son mariage avec Marie de Gulpen, devint aussi seigneur de Rémersdael. Cette seigneurie échut à leur fils Arnold, tandis qu'Obsinnig passait à son frère Jean. Celui-ci épousa en 1528 Jeanne de Holzet dit Oost et mourut le 7 octobre 1562. Leur monument funéraire se voit dans la tribune seigneuriale de l'église.

Michel d'Eynatten succéda à son père Jean, qui lui avait déjà transporté le château d'Avionpuits (Esneux), dont il fit le relief à Limbourg le 7 janvier 1562. Son frère Jean, chevalier de l'ordre Teutonique, administra la commanderie de Fouron‑St‑Pierre. Michel décéda le 4 décembre 1619 et fut enterré au couvent de Sinnich. Il laissait Obsinnig à son fils Winand, qui fut admis en 1652 à l'État noble du duché de Limbourg.

Ce dernier eut, au nombre de ses enfants :

  • Michel‑Vincent qui, après avoir fréquenté l'université de Louvain, fut reçu à l'âge de 23 ans dans l'ordre Teutonique et envoyé comme porte‑drapeau de la cavalerie pour combattre les Turcs en Candie, où il mourut de la fièvre en 1669;
  • Catherine‑Elisabeth, qui épousa son cousin GuillaumeThéobald d'Eynatten de Remersdael ;
  • Jean‑Théobald, qui aliéna en 1697 la seigneurie d'Avionpuits. Il fut créé baron et, en sa qualité de membre de l'État noble du duché de Limbourg, il signa, avec l'abbé Paul Piroulle du Val‑Dieu, Joseph‑Anselme de Draeck de Teuven et d'autres seigneurs, l'acte de serment prêté par les États le 6 décembre 1703, lors de l'inauguration de Charles d'Autriche en qualité de duc, dans l'église paroissiale de Limbourg. Il mourut sans alliance en 1706. Il était le dernier des Eynatten d'Obsinnig.

La seigneurie d'Obsinnich passa à son neveu Frédéric, fils de Guillaume‑Théobald de Rémersdael et de Catherine‑Elisabeth d'Obsinnig en vertu d'un acte de cession lui fait par les sœurs de celle‑ci. Elle se trouva ainsi de nouveau réunie à celle de Rémersdael et fut vendue avec elle en 1721 par le comte Frédéric à la baronne de Hochsteden, qui épousa le baron C. F. T. de Furstenberg.

Le domaine d'Obsinnig comprenait, outre le château et ses dépendances, hormis le moulin et la ferme de Middelhof, 38 bonniers de prairies, 35 de labours, 96 de bois et 4 d'étangs.

Le château est demeuré jusqu'à nos jours dans la famille de Furstenberg. Aliéné le 19 janvier 1953, il a été acquis par M. l'abbé Hilaire Léonard‑Etienne, vicaire à Seraing, et transformé en maison de vacances. Fait à souligner, il n'avait, en l'espace de cinq siècles, appartenu qu'à deux lignages et n'avait, durant cette longue période, été vendu qu'une seule fois.

Le château actuel, qui a remplacé le burg détruit au XIIIe siècle, n'était primitivement qu'un donjon quadrangulaire, aux murailles épaisses, flanqué d'une tour ronde et entouré de fossés. Il fut agrandi vers l'Ouest et deux ailes vinrent s'y adjoindre du côté Sud. La girouette de celle de gauche montre le millésime 1641, tandis que l'autre présente les armoiries des Eynatten et des Goltstein. Le baron Clément de Furstenberg fit reconstruire la tour qui menaçait ruine, exhausser les toitures et prolonger le corps de logis principal vers l'Ouest, où s'ouvre l'entrée, dont le perron est muni d'un grillage avec le blason de la famille.

Nous reproduisons ci‑après la description du château, donnée par Guy Poswick dans son remarquable ouvrage « Les Délices du duché de Limbourg », auquel nous avons aussi emprunté le dessin qui figure en frontispice.

« De la construction primitive, il ne reste plus la moindre trace, mais c'est sur son emplacement que fut édifié le château actuel, dont l'imposante silhouette se mire dans les eaux d'un bel étang.. Malgré les remaniements dont il fut l'objet, il n'en a pas moins grande allure : c'est un des quelques rares châteaux du duché de Limbourg dont on puisse dire qu'il a vraiment l'aspect seigneurial. Le feuillage qui envahit la longue façade Nord, à deux étages, habille agréablement sa maçonnerie en briques, et la tour ronde, à flèche effilée, qui flanque l'angle Nord‑Est, reste d'un heureux effet malgré sa réédification au XIXe siècle. Les niveaux différents des baies marquent deux périodes bien distinctes de construction. Les toitures, couvertes d'ardoises, sont à deux versants et percées de nombreuses lucarnes. Le pignon Ouest, terminé en gradins n'est pas ancien : c'est la partie ma moins pittoresque de l'ensemble. Du côté Sud, deux ailes parallèles, soudées perpendiculairement au bâtiment principal, ont conservé leur aspect. du XVIIe siècle ; elles ont eu la chance d'échapper aux remaniements modernes. La partie la plus ancienne semble être celle qui donne sur la Gulpe, à l'Est; on y voit encore un haut pignon à gradins, des petites baies jumelées à meneaux et des fenêtres à jour quadruple, avec leurs meneaux et croisées.

Suivant la règle générale dans le duché de Limbourg, le château est accompagné d'une ferme toute proche, au Midi: une grande cour, divisée en deux par une grille, sépare la demeure du châtelain du logis du «censier » et des bâtiments agricoles ; ceux-ci ont conservé beaucoup d'attrait. Notons, au-dessus du porche d’entrée à l'Ouest une pierre finement sculptée aux armes des Furstenberg et des Hochsteden, portant le millésime 1730, tandis que la date 1880, taillée dans la clef de voûte, indique l'année où le château et la ferme ont subi d'importantes transformations. » .

 

Comme le signale Grondal dans la première édition, le château a été vendu par la famille de Furstenberg au Major Léonard-Etienne, à son fils l’abbé Léonard-Etienne et à l’abbé Peeters en 1953. Dès 1951, les abbés Peeters et Léonard-Etienne avaient déjà loué le château pour permettre à leurs paroissiens liégeois, où ils étaient vicaires, de passer des vacances à la campagne. La location du château leur coûtait 500 francs à l’époque pour les vacances. Ils l’ont donc acheté pour la somme de 450.000 francs . Le Major Léonard-Etienne est décédé en 1953.

En 1979, les abbés Peeters et Léonard-Etienne ont fait don du château à l’Évêché de  Liège. Celui-ci l’a confié, par un bail emphytéotique à l’a.s.b.l. Castel  Notre-Dame.

Pendant l’année 2000, le Castel Notre-Dame a enregistré ± 14.000 nuitées.

Voyez aussi la page que consacre le Syndicat Royal d'Initiative des 3 Frontières à ce château.

A l'occasion de l'édition 2002, le comité organisateur de la biennale fouronnaise a édité un brochure sur l'histoire du Castel Notre-Dame, due à la plume d'Albert Stassen. Cette brochure est disponible au Castel Notre-Dame et au Centre sportif et culturel des Fourons au prix de 10 €.